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Après huit mois de détention, l'icône de la résistance palestinienne, Ahed Tamimi, a été libérée

La militante palestinienne Ahed Tamimi lors de sa conférence de presse, dans le village de Nabi Saleh, 29 juillet 2018 /

 

A seulement 16 ans, Ahed Tamimi était devenue le symbole de la résistance palestinienne. Condamnée à 8 mois d'emprisonnement pour avoir frappé deux soldats israéliens, la jeune femme est enfin libre.

Ahed Tamimi, jeune activiste palestinienne, avait été emprisonnée à seulement 16 ans pour avoir giflé des militaires israéliens, en décembre 2017. Après 8 mois de détention et un anniversaire passé derrière les barreaux, l'adolescente, héroïne de la résistance palestinienne, a enfin été libérée ce dimanche 29 juillet.

 

Le visage de la résistance

Drapée de son keffieh, symbole de la rébellion palestinienne, Ahed Tamimi est revenue dans son village de Nabi Saleh, en Cisjordanie, occupé par Israël depuis plus de 50 ans. Elle et sa mère avaient été incarcérées le 19 décembre 2017, après la propagation d'une vidéo devenue virale sur le web. La jeune fille, accompagnée de sa cousine, avait été filmée, portant des coups de pieds et de poings à des soldats israéliens. A l'issue d'un accord dit "de plaider coupable", elle avait écopé de huit mois d'emprisonnement et sa cousine, Nour Tamimi, fut libérée en mars. Ahed n'avait alors que 16 ans et elle devint le visage emblématique de toute une population.

 

 

Le retour de la jeune Tamimi fut très peu médiatisé par l'Etat hébreu. Ce dernier a pu notamment donner des informations contradictoires concernant la route empruntée et l'arrivée de l'adolescente et de sa mère. Cela n'a pourtant pas contribué à limiter l'euphorie provoquée par son retour. Les partisans, les proches et les journalistes ne manquent pas à l'appel. Ahed, son regard toisant la foule et ses boucles blondes si caractéristiques, revient en héroïne dans son village originel.

 

Après avoir embrassé, en larmes, leurs proches et soutiens, les deux femmes rejoignent le père sur le chemin de la maison. La jeune femme a rendu visite à la famille d'un parent, mort lors d'affrontements avec des militaires israéliens. Elle s'est ensuite recueillie à Ramallah, sur la tombe de Yasser Arafat, d'un geste fort de symboles, avant d'être reçue par Mahmoud Abbas.

 

Une "freedom fighter" pour certains, une "actrice" pour nombre d'israéliens, Ahed Tamimi n'en reste pas moins l'idéal de la résistance palestinienne à travers le monde. Samedi dernier, deux Italiens ainsi qu'un Palestinien furent arrêtés et accusés "d’abîmer et de vandaliser le mur de sécurité dans la zone de Bethléem", selon la police israélienne. En cause ? Un portrait d'Ahed Tamimi d'une hauteur indécente. Jorit Agoch, artiste de rue italien, avait revendiqué être l'auteur de l'œuvre et a appelé à l'aide samedi via un post Facebook.

We are in arrest in betlemme from israeli army Who can help us please do it

Posted by Jorit on Saturday, July 28, 2018

Un procès-spectacle

Ahed Tamimi a bel et bien soufflé sa 17e bougie dans la prison de Sharon, en Israël. L'affaire, sur-médiatisée, a pu prendre des airs de "procès-spectacle", selon l'avocate de la jeune femme, Gaby Lasky. En effet, lors de sa première audience, l'avocate d'Ahed avait annoncé vouloir faire du procès de sa cliente celui de l'occupation israélienne : plaider coupable ne semblait donc pas être une option. "Nous avons compris qu'il n'y avait aucune chance qu'Ahed puisse bénéficier d'un procès équitable. À cause de la façon dont le procès a été géré par le système judiciaire, nous avons pensé que c'était la meilleure façon d'avancer", s'est défendue l'avocate à la radio militaire israélienne, constatant le refus des autorités à rendre le procès public.

 

Autre zone d'ombre : huit chefs d'accusation ont pu être abandonnés au cours du procès par le Tribunal, ne retenant que quatre charges contre la jeune fille. "Le fait que l'accord de plaider-coupable prévoit l'abandon de tous les chefs d'accusation qui ont permis de la détenir jusqu'à la fin de la procédure judiciaire est la preuve que l'arrestation de Tamimi au milieu de la nuit et les poursuites judiciaires contre elle étaient des mesures conçues pour régler des comptes", explique Gaby Lasky. En effet, il la viralité des images et la prétendue humiliation perpétrée contre l'armée avaient poussé la droite israélienne à redoubler de charges contre la jeune fille. Cependant, l'émotion générée, à travers le monde, par la vidéo ont galvanisé les critiques à l'égard de la justice israélienne, notamment concernant l'incarcération des mineurs palestiniens. Portant "atteinte à [sa] réputation dans les médias et au niveau international", selon une source évoquée dans le journal Haaretz, la peine aurait possiblement été allégée.

 

Une lutte qui continue

"La prison m'a appris bien des choses; j'ai pu trouver la meilleure façon de faire connaître le message de ma patrie", a déclaré Ahed Tamimi lors de sa conférence de presse. Si la jeune Palestinienne a essuyé sa peine, elle semble n'en revenir que d'autant plus forte : "Ma joie sera incomplète tant que tous les prisonniers ne seront pas libérés. J'espère que tout le monde suivra ce chemin de résistance", plaide-t-elle. Elle compte notamment poursuivre ses études dans la justice afin de "défendre la cause de mon pays dans tous les forums internationaux et pouvoir défendre celle des prisonniers". Le président palestinien, suite à sa rencontre avec Ahed, parle lui-même d'"un modèle de résistance civile pacifique".

 

La libération de la jeune Tamimi met en exergue la situation inégale qui perdure entre les mineurs israéliens et palestiniens. Elor Azaria, soldat franco-israélien, condamné à 18 mois de prison pour avoir assassiné un palestinien déjà blessé, sera libéré après seulement neuf mois d'incarcération. Une inégalité de traitement dénoncée par de nombreuses organisations de défense des droits de l'Homme: "Des centaines d'enfants palestiniens restent derrière les barreaux et ne bénéficient d'aucune attention", s'insurge Omar Shakir, d'Human Rights Watch en Israël.

 

 

source:https://www.lesinrocks.com/2018/07/30/actualite/apres-huis-mois-de-detention-licone-de-la-resistance-palestinienne-ahed-tamimi-est-enfin-libre-111110184/

 

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