Ma lecture de nos sondages

La défaveur annoncée dans les sondages ne correspond à aucun autre de nos indicateurs dont tout le monde sait chez les insoumis que je suis un friand consommateur. Le dernier en date n’est pas le moindre : 700 000 euros d’emprunt populaire réalisés en moins de 48h. C’est plus du triple de ce que nous avons encaissé en dons depuis le 15 janvier, qui est de 190 000 euros. Une méthode inédite. Ce succès n’est pas celui d’une maison démobilisée. Les autres indicateurs suivent. Pas un mois sans nos mille adhésions en ligne, pas une semaine sans nos trois cent évènements et ainsi de suite.

 

Pour autant, je ne veux pas fanfaronner. Ce n’est pas le choix que nous avons fait. Nous avons essayé de voir quel argument était en commun à toutes les entreprises de sondages pour expliquer la situation qu’ils décrivent. En fait il y en a peu. Chaque entreprise contient une statistique aberrante qui produit le résultat bas que nous connaissons. Celle-ci 0% chez les étudiants, celle-là un report inédit de nos électeurs vers Macron, etc. Ca sent le ficelage de dernière minute. Pour autant, nous ne croyons pas être la cible d’un arrangement spécifique. L’arrangement concerne le tableau général que ces gens sont payés pour produire. Il s’agit pour eux de montrer des macronistes très hauts et de fabriquer une compétition avec le FN.

 

Ce tableau est rendu difficile à peindre parce que les Républicains (LR) remontent sur le dos des Macronistes et que les macronistes baissent nettement. C’est quand même conforme à la situation politique… La domination sans partage des macronistes est une légende de propagande gouvernementale. Comment serait-elle possible, alors même que se déploie la plus longue et sévère lutte sociale de l’Histoire du pays depuis cinquante ans ? Cela ne peut convaincre que les salles de rédaction dont les chefs ne sortent jamais sur le terrain et les rubricards qui enquêtent en déjeuners de presse. Les macronistes baissent en direction d’EELV, du PS et de LR. Cet effet d’éparpillement n’a rien de surprenant car le macronisme électoral est un agrégat instable entre « centre droit » et « centre gauche ». Une sorte d’UDF gonflée à l’hélium du dégagisme de la présidentielle.

 

Mais une fois dissout l’effet « divine surprise » devant la suppression de l’ISF et les autres mesures de ce type, la droite traditionnelle retourne au bercail. Car l’amateurisme dans la gestion de l’État, les couacs à répétition dans les annonces, les ex-membres du PS troubles comme Castaner et Belloubet qui installent leur clan d’anciens camarades, la pagaille indomptée du mouvement gilet jaune, tout cela repousse les amis de l’ordre. Comment oublier que Fillon fit 20% des voix à la présidentielle et dans quelle tempête ? La droite existe en France ! Elle n’est pas soluble dans la start-up des givrés du pouvoir par « effraction ». Le sauvetage du soldat Loiseau se fait donc souvent au prix de diverses triturations sondagière sur le dos de tous les autres. C’est contrariant à court terme. Mais cela reste productif. Car les urnes parleront. Elles diront leur message. La déconvenue de ceux qui croient déjà tout acquis produira son effet de débandade dès le lendemain de l’élection européenne.

 

En attendant, ce que tous les sondeurs nous disent d’une même voix, c’est que les électeurs de la FI de l’élection présidentielle sont les moins mobilisés de toutes les familles politiques. Très nettement moins. Jusqu’à quinze points en dessous du précédent dans cette liste. Nous avons décidé d’accepter cette indication et de travailler sur cette base. Nous savons qu’à l’approche de la date des élections l’intérêt grandira, les mentalités changeront, le désengagement des nôtres se réduira. Notre point de repère reste plutôt l’élection législative parce qu’elle était déjà atteinte par l’effet d’abstention massive pour ce qui nous concerne. Déjà, à l’époque, les « enquêtes » ne nous donnaient pas plus de 5 sièges. Nous en avons gagné 17. Et même 23 si l’on compte les six candidats communistes que nous avons soutenus dès le premier tour. Nous ne croyons bien sûr à aucun effet mécanique. Notre campagne reste méthodique et le plan de marche reste celui de toute nos campagnes : en toutes circonstances une omniprésence en profondeur. Et la dose d’invention d’outils nouveaux qui rendent chaque jour plus autonome notre mouvement.

Jean Luc Mélenchon

 

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