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"C'est le hashtag #SignaleUnMusulman qui confond islamistes et musulmans"

Marianne : Ce hastag #Signaleunmusulman a été le ralliement de ceux qui estiment que ce qu’a décrit le ministre Castaner, comme le port de la barbe ou le refus de serrer la main des femmes, seraient de simples éléments de pratique de l’islam et non de radicalisation, et qu’il s’agirait donc d’une suspicion généralisée contre les musulmans dans leur ensemble. Est-ce un risque ?

Zineb El Rhazoui : Il n’y a que les islamistes européens pour nous expliquer que la barbe salafiste et l’apartheid sexuel sont des usages normaux. Dans la société marocaine où j’ai grandi, où quasiment tout le monde est musulman, la sagesse populaire ne s’y trompe pas : lorsqu’un homme se laisse pousser la barbe et qu’il cesse de saluer les femmes, on l’appelle un « Ikhwani », un frériste (en référence à l’organisation des Frères musulmans). On appelle aussi « ikhwaniya » toute femme qui porte le voile. Le hashtag #signaleunmusulman donne libre cours aux pires procédés victimaires, de façon infondée et volontairement fallacieuse. J’y vois défiler des étoiles jaunes sur lesquelles il est écrit « Muslim », ce qui n’est rien de moins qu’une insulte à la mémoire des Juifs exterminés pendant la Seconde guerre mondiale. Qui peut prétendre que les Français de confession musulmane, qui jouissent de la pleine citoyenneté et de l’égalité des droits, seraient aujourd’hui une cible d’extermination ? D’autant que la seule idéologie génocidaire qui sévit aujourd’hui en France et qui continue de faire quelques morts par ci et quelques dizaines de morts par là, c’est justement l’idéologie islamiste qui appelle à exécuter les mécréants, les homosexuels, les Juifs et les chrétiens. Ce hashtag honteux nous dit en substance : Mickaël Harpon n’était pas un égorgeur islamiste, mais un musulman.

Il nous dit aussi que dénoncer les islamistes, c’est s’en prendre à tous les musulmans. Et ce sont les mêmes qui osent par la suite nous accuser de faire un amalgame entre islam et terrorisme ? Ce hashtag participe du chantage victimaire indispensable aux islamistes pour faire avancer leur idéologie fascisante. Comme tous les fascismes, le fascisme islamique a besoin de faire croire à ses adhérents et sympathisants qu’ils appartiennent à une communauté persécutée courant un péril imminent, et qui doit donc se relever et répliquer à l’agresseur. Cette dialectique essentialiste est un piège classique de l’islamisme : à chaque fois qu’un attentat islamiste fait couler le sang, ils accourent pour crier « ce n’est pas ça l’islam », mais si vous dénoncez l’idéologie qui génère ses attentats, ils vous accusent de vous en prendre à tous les musulmans.

Est-ce que le problème ne vient pas du fait que, depuis le début de cette vague d’attentats islamistes, les politiques entretiennent un flou sur la question de l’islam radical ? Ils apportent une réponse sécuritaire aux attentats à travers le renseignement et les opérations de police, mais ils ne savent pas comment traiter le séparatisme qui fracture la société française même quand il ne débouche pas sur des délits ou des crimes ?

Est-ce qu’ils ne savent pas le traiter, ou est-ce qu’ils ne veulent pas le traiter ? Comment ne pas se poser la question lorsque l’on nous parle de lutte sans merci contre le terrorisme d’une part, et que l’on voit les mêmes responsables politiques qui tiennent ce discours s’acoquiner avec les pires figures de l’islamisme par ailleurs ? Il est certain que l’État français a un problème de doctrine, il prétend lutter contre le terrorisme, mais continue à laisser sévir les prêcheurs de l’islamisme, voire leur cède des terrains pour construire des mosquées et subventionne leurs associations. Il n’est pourtant pas compliqué de comprendre que les attentats terroristes sont des crimes idéologiques, et qu’il ne sera pas possible de les faire cesser tant que les écosystèmes associatifs qui promeuvent cette idéologie n’ont pas été éradiqués. Lorsque l’Europe a voulu se dénazifier après la seconde guerre mondiale, ses dirigeants ne se sont pas contentés de juger les nazis coupables de crimes de sang comme des criminels de droit commun, ils ont aussi traqué l’idéologie nazie, interdit sa littérature, ses ligues et associations. Nous en sommes loin aujourd’hui, car non seulement l’État français rechigne encore à interdire l’organisation des Frères musulmans et sa branche française l’UOIF rebaptisée Musulmans de France (dont l’imam de la mosquée de Gonesse Hassan el Houari est un cadre), mais il continue de considérer de nombreux membres de cette organisation comme des interlocuteurs respectables (certains sont même décorés de la Légion d’Honneur). Par ailleurs, tant que cette dangereuse dérive sectaire nommée salafisme continuera à être considérée comme une pratique « normale » de l’islam, des milliers de Mickaël Harpon continueront à évoluer sous notre nez sans que l’on n’ait le moindre outil juridique pour les mettre hors d’État de nuire. Comment voulez-vous en effet que l’État puisse lutter contre quelque chose de légal ?

Si Mikaël Harpon avait fait l’objet d’une radiation ou même d’une mise à l’écart pour ses propos sur Charlie Hebdo ou son refus de serrer la main d’une femme, il se serait immédiatement trouvé une cour de justice pour le réintégrer. Une société fondée sur la liberté d’opinion dans la limite du droit peut-elle trouver des armes pour se protéger ?

Ah mais le CCIF et ses acolytes en auraient fait une affaire d’État ! Toutes ces officines qui font du jihad judiciaire, cachées sous la bannière de l’antiracisme, et qui n’ont pour objectif que d’inscrire le délit de blasphème (pour l’islam exclusivement) dans nos lois, ces nouvelles ligues d’extrême droite islamique, auraient fait pleurer dans les chaumières sur ce pauvre policier discriminé parce que converti à l’islam, handicapé et d’origine antillaise. Il se serait trouvé des chroniqueurs, des hommes politiques et des journalistes qui, voulant prouver qu’ils font partie du camp du bien, auraient défendu celui qui allait égorger ses collègues plus tard parce que Kuffars. D’ailleurs, ces associations qui sèment la division, qui persécutent des intellectuels français et instrumentalisent la justice française au profit de leur agenda identitaire, ne devraient plus avoir le droit de se constituer partie civile. Seules les associations qui luttent contre tous les racismes, y compris celui des islamistes, devraient avoir le droit d’intenter ce type de procès.

Pas de liberté pour les ennemis de la liberté ! Ceci devrait être la devise des pouvoirs publics français dans les années à venir.

Source : Marianne

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