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Parti seul, Jean-Luc Mélenchon se voit plus que jamais central à gauche pour 2022

Candidat pour la troisième fois de suite à l’élection présidentielle, Jean-Luc Mélenchon a tenu samedi son premier meeting de campagne. Une réunion 100 % numérique retransmise sur les réseaux sociaux et en réalité virtuelle qui a atteint un pic de 25 000 spectateurs lors d’un discours d’une heure.

 

Pour l’instant, c’est lui qui donne le ton de la campagne à gauche. En annonçant au début du mois son intention de se porter candidat à la présidentielle pour la troisième fois de suite, Jean-Luc Mélenchon a soudainement accéléré le calendrier électoral. Ecologistes et socialistes viennent tout juste d’enclencher le leur, le laissant tribun seul en piste sur cette partie de l’échiquier politique.

La relative froideur avec laquelle ces derniers ont accueilli sa déclaration de candidature a donné un avant-goût de la bataille à venir pour s’emparer du leadership à gauche, en vue de 2022. Après avoir tutoyé la barre des 20 % des suffrages en 2017, Jean-Luc Mélenchon aborde cette nouvelle échéance avec la conviction d’avoir déjà plié le match avec ses meilleurs ennemis.

« Lâchetés ». « Partout en Europe, les sociaux-démocrates ou ce qu’il en reste se retrouvent dos au mur, confrontés à la marée brune après avoir additionné les lâchetés. En Italie, le courant socialiste a été rayé de la carte. Ici en France, il ne reste que nous à la tête du combat contre le libéralisme », proclame le chef de file de La France insoumise (LFI).

« Mes relations avec la gauche ne sont pas tendues, mais de nature inclusive », nuance-t-il toutefois, se disant prêt au rassemblement « mais pas au prix de la confusion ». « Il s’agit de former quelque chose de différent », précise le député des Bouches-du-Rhône. En gage de bonne volonté, il a ainsi proposé il y a deux semaines de mettre son programme en débat avec la gauche politique, associative et syndicale jusqu’à l’automne prochain.

« Les différentes gesticulations qu’on peut voir aujourd’hui autour de la question de l’unité sont non seulement hypocrites, puisqu’aucun d’entre eux n’a l’intention de renoncer à sa candidature, mais elles donnent surtout l’impression qu’il n’y aurait pas de sujets à trancher. Mettre un voile dessus pour ne pas en parler ne ferait qu’aggraver les choses », argumente Jean-Luc Mélenchon. Notamment la chute de la participation aux échéances électorales qu’il juge particulièrement préoccupante. C’est pourquoi le président du groupe LFI à l’Assemblée nationale s’est fixé pour objectif de « ramener la gauche au peuple » en 2022.

« Nous ne partons pas d’une situation où des masses de gens sont présentes dans l’arène politique, c’est le contraire ! Ils n’y sont plus. Nous vivons des moments d’abstention qui n’ont pas l’air de poser trop de problèmes aux appareils politiques mais qui en sont pour la démocratie. On n’avait jamais vu ça pour une élection municipale. L’éparpillement peut donc être un handicap, mais la confusion est sans doute le premier », conclut-il. Jean-Luc Mélenchon est d’autant plus prêt à la confrontation des programmes qu’il estime avoir gagné en centralité à gauche au cours de ces dernières années.

« Eurolâtres ». Ainsi de la question européenne, un désaccord de longue date entre les différents partis de gauche. Les responsables de LFI ont remarqué récemment une évolution de la part de leurs anciens adversaires aux européennes, à l’image du député européen Raphaël Glucksmann, ancienne tête de liste soutenu par le PS. « La question de l’Europe est tout à fait nodale, reconnaît Jean-Luc Mélenchon. On voudrait que je tranche en noir et blanc, je devrais être soit un partisan acharné de l’Europe telle qu’elle est avec quelques remarques à la marge ou alors je devrais dire “on s’en va”. Ce n’est pas ma position. »

Le tribun assure ne pas avoir varié d’un iota depuis la victoire du « non » au référendum de 2005 sur le traité constitutionnel européen. « Il faut sortir des traités. Si je préside la République, nous demanderons l’ouverture de discussions pour les rediscuter. Ensuite, nous n’obéirons pas à des consignes qui seraient contradictoires avec notre programme », résume Jean-Luc Mélenchon. Et de glisser que la plupart des propositions d’Europe Ecologie-Les Verts (EELV) sont « inapplicables dans le cadre des traités actuels ». Sur ces sujets, « je donne le la car ils sont moins eurolâtres qu’avant », assure le candidat à la présidentielle.

Côté socialiste, c’est sur une autre question brûlante que s’est bâtie ces derniers temps l’opposition à Jean-Luc Mélenchon. Les figures du PS, dont la dernière en date est Anne Hidalgo, pointent à l’envi les « ambiguïtés » de LFI et de son chef de file sur la laïcité et l’islamisme. Lui qui avait qualifié de « semaine noire » les jours qui se sont écoulés après l’assassinat de Samuel Paty confie sa « peine » d’avoir été catalogué d’« islamo-gauchiste » par La République en marche. « Cette attitude est dangereuse, y compris pour eux-mêmes. C’est la cohésion de la France qui est en jeu. Il s’agit derrière cette lepénisation du débat de montrer du doigt les musulmans. Mais la laïcité, ce n’est pas l’athéisme d’Etat ; si le jihad doit être combattu, les musulmans doivent être respectés », alerte Jean-Luc Mélenchon.

Quant au fait que le PS se soit fait l’écho de ces critiques, il s’agirait en réalité pour lui d’un signe de faiblesse. « C’est quand même le clivage du pauvre. C’est moi qui ai appris à nombre d’entre eux ce qu’est la laïcité ! Ils pensent que ça va payer parce que sur l’économie et le social, ils n’essaient même plus de cliver avec nous. Mais je sais que j’aurai le dernier mot », affirme-t-il. Finalement, c’est avec les communistes que le chef de file des Insoumis reconnaît la plus grande proximité dans le moment actuel. Le PCF, précieux allié dans la récolte des cinq cents parrainages, va devoir à nouveau trancher la question Mélenchon. Comme le reste de la gauche dont il espère qu’elle reconnaîtra une nouvelle fois son champion en lui.

 

 

Source : L'Opinion

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