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Anti-confinement : des rebelles surtout virtuels ?

On a tous en tête les images venues des Pays-Bas où des manifestants anti-couvre-feu ont foutu le feu à des voitures et des poubelles avant d’être arrêtés par la police. Et, au pays de la Révolution, des manifs de 36, des barricades de 68 et des gilets jaunes, on fait quoi ? Pas grand-chose. Mais il faut se méfier de l’eau qui dort. De la bamboche des policiers d'Aubervilliers au hashtag #JeNeMeConfineraiPas, la révolte est multiforme et gronde, paraît-il.

 

En France, on n’a pas de variant, on n’a pas de vaccin, mais on a des rebelles. Ils fourmillent plus sur les réseaux sociaux qu’en manifestation mais méritent quand même qu’on s’y attarde un peu. Typologie non exhaustive de ces rebelles de pacotille, virtuels comme réels

 

Les parents anti-masques pour les enfants

 

À tout seigneur, tout honneur. Depuis l’article de Charlie Hebdo sur Ces parents qui nous pompent l’air, ces géniteurs soucieux de ne pas priver d’oxygène leurs enfants sont devenus de fervents et critiques lecteurs de notre site. À l’offensive sur les réseaux sociaux, ils protestent contre le port du masque pour leurs gamins et appellent à des rassemblements qui dépassent rarement quelques centaines de manifestants.

 

#JeNeMeConfineraiPas

 

Lancé le 22 janvier en pleine valse-hésitation du gouvernement sur l’urgence à prononcer un troisième confinement, le hashtag #JeNeMeConfineraiPas fait florès sur Twitter. Mentionné plus de 100 000 fois dans les derniers jours de janvier, il s’est même classé en TT les jours suivants. Fabien Quedeville, médecin généraliste en Essonne, est à l’origine de ce hashtag. Il est aussi le responsable éditorial du site Bas les masques lancé fin novembre 2020 et qui dit proposer « une information libre et objective sur la crise sanitaire ». Son cœur de cible : tous ceux qui pensent qu’on en fait trop sur la dangerosité du Covid-19 et que le gouvernement s’y prend comme un manche. Le toubib qui appartient à la mouvance dite « rassuriste » est également membre du réseau Sentinelles (une structure gouvernementale de veille médicale). Le hashtag est, comme de nombreux autres mouvements sur les réseaux sociaux, surveillé à la loupe par le gouvernement pour jauger de l’état de la contestation virtuelle. Après avoir enflammé la toile, Fabien Quedeville dit vouloir « provoquer le débat sur les effets néfastes » d’un nouveau confinement, mais assure qu’il respectera les consignes d’un troisième tour de vis. Heureusement que Francis Lalanne appelle, lui, à l’insurrection et au renversement du chef de l’État. N’est pas chanteur à cuissardes qui veut !

 

 

L’homme qui voulait « donner l’élan »

 

Inconnu hier, Christophe Wilson est devenu l’homme du jour, mercredi 27 janvier. Ce restaurateur niçois a bravé la fermeture des établissements. « Il faut qu’il y ait quelqu’un qui donne l’élan à tout le monde, et si ça doit être moi qui doit prendre les risques, je les assume », a lancé bravache le chef en recevant pour l’occasion une centaine de clients. « J’espère que tout le monde va suivre le mouvement et que toute la population de notre pays va reprendre le cours de sa vie normale. » Lui-même a dû fermer illico et a été mis en garde à vue « dans le cadre d’une procédure pour emploi d’un étranger en situation irrégulière », a précisé le parquet avant qu’il ne soit remis en liberté. Résultat de la rébellion du patron niçois : le placement en rétention de son cuisinier, un Ivorien de 34 ans, employé au noir qui, selon Le Figaro, s’est vu délivrer une obligation de quitter le territoire français (OQTF). Celui-ci paye les pots cassés et la grande gueule de son patron. Bien joué, le grand chef rebelle !

Le site Réaction19 et sa TV web

Les vidéos de l’avocat Carlo Alberto Brusa valent le détour. La dernière en date annonce le dépôt de dizaines de milliers de fiches contact (l’homme revendique 70 000 abonnés à sa chaîne YouTube) signant l’appel Stop au confinement au plus vite, c’est-à-dire demain, samedi 30 janvier. L’homme se basant sur la prévision d’une prise de parole du chef de l’État dimanche. Grâce à un habile aiguillage, tous ces mails arriveront dans l’ordinateur de Me Alberto Brusa qui les remettra aussi à Macron. Un courrier juridique accompagnera ces notifications. Nul doute que cela devrait aider le président de la République à réfléchir et à décider du degré de sévérité d’un éventuel nouveau confinement. En attendant, l’avocat se prépare une belle base de données numérique.

Le #1er février, tous au resto ?

 

Des posts circulent pour faire du 1er février, une « journée de désobéissance citoyenne » et exiger « la réouverture des restaurateurs ». Cet hiver, quelques manifestations ont rassemblé les patrons de restaurants, de discothèques et bars, excédés de voir la date de réouverture de leurs établissements constamment repoussée et d’être laissés dans l’expectative quand à leur devenir. Sur RMC, un restaurateur du Doubs expliquait tranquillement qu’il ouvrirait le 1er février prochain avec l’aval des RG. «  J’appelle à une désobéissance civile aux lois liberticides que l’État nous impose. (…) C’est un mouvement national ! J’avais les renseignements généraux, ils sont d’accord. Je ne cache rien, j’explique la méthode et nous suivront le protocole sanitaire. Nous ne sommes pas inconscients ! », clamait-t-il sur le plateau des Grandes Gueules avant de se demander « à quand une grande biture nationale » pour « manger du cochon, boire du Ricard » et se « faire plaisir ?  » Dans le respect des gestes sanitaires sans doute ?

 

Selon lui, la mobilisation du 1er février devrait être massive. Il n’est pas le seul à pronostiquer la révolte populaire contre le confinement. Sur Twitter, l’ancien gilet jaune, Maxime Nicolle, juge réaliste l’hypothèse d’une « désobéissance citoyenne massive ». Ce qui pourrait rassurer l’exécutif, les propos de Maxime Nicolle étant rarement frappés du sceau de la raison.

 

 

D’ailleurs, contrairement à ce que peuvent donner à penser les réseaux sociaux ou l’importance que les médias leurs donnent, les Français, même fatigués de la gestion erratique de la crise sanitaire, même dégoutés de porter le masque pendant des heures dans les transports, au boulot, à l’école, même énervés de ne pas pouvoir aller au restaurant ou au cinéma, comprennent et acceptent – encore – les raisons de ces restrictions de liberté.

 

Mercredi 27 janvier, un sondage réalisé par l’institut Elabe pour BFMTV notait que si les sondés étaient à 52 % contre un nouveau confinement national strict sur le modèle de celui de mars dernier, ils étaient à 52 % favorables à un confinement assoupli comme à l’automne. Le lendemain, un autre sondage de l’institut Harris pour LCI expliquait que 64 % des sondés sont, malgré toutes les contraintes que cela suppose, favorables à un troisième confinement. Il faut croire que les sondeurs n’appellent jamais les rebelles virtuels. ●

Source: Charlie Hebdo

 

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