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LFI candidate aux régionales : « On n’est pas des gauchistes !

Pouvez-vous brièvement vous présenter ?

Marie-Madeleine Doré-Lucas. J’ai 61 ans. Je suis une fille du pays Pourlet. Je suis la 7e de neuf enfants. Mes parents étaient des petits paysans. J’ai un doctorat de droit public avec une spécialité en droit européen. J’ai travaillé à Bruxelles et Paris puis j’ai regagné la Bretagne où j’ai créé mon cabinet de formatrice consultante. Je suis cheffe de file de l’opposition municipale à Pontivy (56) et conseillère communautaire.

Pierre-Yves Cadalen. J’ai 29 ans. Je suis professeur en sciences politiques. Je suis engagé depuis 2013. J’étais d’abord au parti de gauche puis j’ai prolongé quand la France Insoumise a été créée.

Où en est LFI en Bretagne ? Vous avez toujours l’intention de présenter une liste aux régionales ?

M.-M. D.-L. Plus que jamais. Il faut une alternative, notamment face à un modèle agricole productiviste inféodé à l’agrobusiness.

P.-Y. C. Il faut recréer en ce moment des espaces politiques. Les gens ont besoin de discuter. C’est notre responsabilité d’y aller.

Qui mènera la liste ?

M.-M. D.-L. On est en discussion avec Ensemble !, Génération. s et le Parti communiste. On espère créer cette alternative de gauche à plusieurs. La liste sera très large.

P.-Y. C. Depuis septembre, on est dans une démarche d’ouverture complète. Il faut faire un choix politique clair. On peut finir devant le Parti socialiste.

« On a des gens qui sont capables de gouverner la région »

Vous êtes ouverts mais vous vous êtes pris une sacrée veste avec les écologistes. EELV a refusé de faire alliance avec vous…

M.-M. D.-L. Ce n’était pas une veste ! Il y a une convergence entre nous sur les questions sociales, écologiques mais ils ont brandi un prétexte purement politicien : la question du fédéralisme et de l’Europe des régions.

P.-Y. C. Ce ne sont pas des éléments qui déterminent les politiques régionales. C’est de la mauvaise foi.

Si c’est un prétexte, pourquoi EELV a fait ça ?

P.-Y. C. Je pense qu’ils se ménagent un accord avec le Parti socialiste au second tour.

Ne craignez-vous pas au final d’être un peu seuls ?

P.-Y. C. On veut créer un rapport de force pour créer les conditions d’un accord avec les Verts au second tour.

Vous seriez donc encore prêts à faire alliance avec EELV ?

P.-Y. C. Si on est d’accord sur un fonds programmatique, oui. Nous, on n’est pas des gauchistes. On a des gens qui sont capables de gouverner la région.

Vous accédez demain au pouvoir régional, quelle sera votre priorité ?

M.-M. D.-L. La rupture avec le modèle productiviste. Parce que les dégâts collatéraux sont dramatiques pour la planète, pour nos enfants, nos petits-enfants. Avec des paysans ubérisés, pieds et poings liés à des coopératives ; une concentration animale ; la pollution des eaux ; les pesticides…

C’est le discours d’EELV. N’y a-t-il pas un peu d’opportunisme de votre part ? On n’était pas habitués à ça chez LFI.

P.-Y. C. Ha si, toujours ! Jean-Luc Mélenchon, en 2008, écrit le manifeste pour l’éco-socialisme. On fait partie d’un courant de pensée qui s’inscrit dans la perspective de l’écologie politique dans le pays. Il n’y a pas d’opportunisme. Tout le monde va parler d’environnement. La question, c’est comment on en parle. Nous, on la prend à travers l’économie.

M.-M. D.-L. L’écologie, ce n’est pas l’apanage, comme le breton, d’un parti ou d’un mouvement. L’écologie irradie toutes les politiques publiques. C’est de la transversalité.

« Il faut que les agriculteurs retrouvent leur autonomie »

Pour en revenir à la question agricole, quel modèle défendez-vous ?

M.-M. D.-L. Il faut arrêter la course effrénée aux élevages intensifs. Jusqu’à quand on va continuer à mettre en place des plans volailles, des plans porcs ? Il faut changer le modèle et opter pour d’autres choix de production. L’agriculture bio progresse mais ça ne suffit pas. Il faut que les agriculteurs retrouvent leur autonomie.

P.-Y. C. Le modèle à l’export ne sauve personne. Un tiers des exploitations agricoles ont disparu en dix ans en Bretagne. Ce modèle est archaïque, destructeur pour l’environnement et nul pour les paysans.

Loïg Chesnais-Girard, le président du conseil régional, explique qu’il préfère avoir du poulet breton plutôt que du poulet brésilien ou des pays de l’Est.

M.-M. D.-L. Le plan volaille et le plan porc sont surtout destinés à de l’exportation. Il faut arrêter d’exporter. Ça éviterait en plus d’importer du soja transgénique.

Mais en appelant à des changements aussi radicaux, ne craignez-vous pas de faire peur aux salariés d’une filière de l’agroalimentaire qui pèse énormément dans la région ?

P.-Y. C. Doux a fermé, Tilly Sabco a fermé, Synutra, c’est une catastrophe. C’est un modèle qui s’essouffle.

Comment jugez-vous globalement la politique de Loïg Chesnais-Girard ?

P.-Y. C. Il n’y a rien de personnel. Mais je ne peux pas concevoir que quelqu’un se dise socialiste – si ce mot a encore un sens – si c’est pour faire de la politique qui ne convient qu’à un petit groupe de grands patrons bretons. Après, le soir du premier tour, on ne sait pas s’il va fusionner avec la liste de son vice-président En Marche (Thierry Burlot, NDLR) ou avec quelqu’un d’autre, les Verts par exemple. Comment peut-on espérer faire renouer les gens avec la politique avec des perspectives aussi floues ?

Que pensez-vous de la question de la réunification de la Bretagne, qui fait toujours débat ?

M.-M. D.-L. La question mérite d’être soulevée. Maintenant, si c’est pour recréer du jacobinisme au niveau régional, on peut s’interroger. De toute manière, ça doit passer par un référendum.

 

source: https://www.letelegramme.fr/

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