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La dynamique pour dépasser les limites des compromis exige au préalable des compromis

 

Cette nuit un accord pour les législatives a été signé entre la France Insoumise (FI) et Europe écologie les verts (EELV). Les Ecolos ne voulaient pas du sigle Union Populaire. Julien Bayou avait formulé mercredi de sévères critiques sur la question du "label commun". Finalement ce sera Nouvelle Union Populaire que tous les "vrais gens" appelleront...l'Union Populaire. 

 

Des divergences plus sérieuses existent sur l'EU avec certains partenaires de gauche. Macron s'est même permis d'interférer dans la discussion "La question pour ou contre l’Europe ce n’est pas rien. La carpe ce n’est pas le lapin". Macron, comme à son habitude, ment. La question n'est pas d'être pour ou contre l'Europe, question absurde du genre la terre est-elle ronde ? Car la vraie question est: l'Union Européenne est-elle dans son rôle quand elle interdit des mesures de progrès social ou initie à coup de "recommandations", qui sont en fait des oukases, la casse des services publics et la généralisation des privatisations ? Ou quand elle s'aligne sur la politique impériale des Etats-Unis ? Et dans ce cas le peuple souverain en France, et ailleurs, doit-il obéir à des traités néolibéraux qui imposent des politiques anti-sociales et bellicistes ? Puisque Macron est devenu un fervent partisan du RIC qu'on pose donc la question au peuple. Il risque, comme en 2005, de créer la surprise...

 

Un compromis, car oui l'Union Populaire ne pourra s'élargir sans compromis, a été trouvé entre EELV et FI. Ce sera la "désobéissance" envers certaines règles européennes. Ce compromis est déjà le résultat d'un rapport des forces entre FI et EELV (22 à 4). Ce sera d'autres rapports des forces qui seront à l'origine de la traduction concrète des termes du compromis. Les cornichons qui ne manqueront pas de s'offusquer que le Frexit ne soit pas à l'ordre du jour sont tout simplement incapables de saisir que les situations politique sont mouvantes, changeantes, en dynamique et qu'à terme c'est l'intervention des masses qui compte, et est décisive et non les proclamations des "grands timoniers". Grands, c'est une façon de parler, quand ceux-ci parviennent à peine à réunir (d'après leurs propres chiffres) 10 personnes à Paris, Marseille et 5 à Lyon. Et encore ces chiffres sont sujet à caution car selon l'un des Timoniers "il y a les chiffres arithmétiques et les chiffres politiques"...les vérités alternatives comme disait Trump.

 

Avec le PS les négociations avançaient mais le PS les a suspendues face à l'offensive en règle de la droite sociale-démocrate. Cambadélis appelle Hollande, Cazeneuve, Hidalgo, Le Foll, Aubry, Rebsamen, Delga et toute cette clique à organiser le refus de l'Union populaire, "l'intégration dans un bloc mélenchonisé", et à refonder un nouveau parti, comme "le PS avait remplacé la SFIO".

 

Bien gentil le Jean-Christophe mais il devrait songer à répondre à la question suivante: en France les conditions politiques de l'existence du social-néolibéralisme existent-elles ? 1,7%. Ce chiffre devrait l'aider à répondre. Il ne suffit pas d'enrager contre le "vote utile" en faveur de Mélenchon mais de se demander pourquoi ce "vote utile" est allé vers lui et non vers le PS comme ce fut le cas jusqu'en 2017. Nous pensons que broyés entre Macron qui applique (à peu près) leur politique et la gauche de gauche, les socialistes n'ont pas plus d'espace que les LR coincés entre LREM et RN. Le PS, comme Capri*, c'est fini. Cambadélis craint la "mélenchonisation" du PS et Delga fait des leçons de morale, citant Pierre Mendès-France: "La morale en politique interdit que stratégie et convictions divergent, fut ce pour des motifs d’opportunité transitoire. C’est ce que j’appelle la vérité." La morale en politique venant d'une secrétaire d'Etat des gouvernements Valls 1 et 2 et d'une arriviste et sectaire notoire qui a exclu sans autre forme de procès la FI des listes régionales peut surprendre. Quant à Cambadélis il suffit de se souvenir de ce que fut sa "Belle alliance populaire" pour saisir le sérieux du bonhomme et attraper le fou-rire.

 

Le PCF, après la baffe des 2,2% recueillis par Fabien Roussel, et qui semblent étrangement le satisfaire, semble aller aussi vers un accord avec la FI. "Nous allons respecter le rapport de force issu de la présidentielle, chacun avec un groupe fort de nos différences qui sont une richesse. J'ai lu que Jean-Luc Mélenchon s'engageait à cela." a déclaré sagement Roussel. La divergence sur le nucléaire semble en voie d'être surmonté. Les uns et les autres s'adaptant à une conjoncture énergétique complexe. Les communistes semblent devoir obtenir la création d’un pôle financier public avec la nationalisation de banques, ce qui serait un vrai enrichissement du programme minimum commun.

 

En tous les cas les "identitaires" du PCF seront une fois de plus les cocus de l'histoire ce qui est normal compte tenu du logiciel obsolète qui est le leur sur tous les plans. Quand on nie le réel celui-ci se venge. 

 

Il est à cet égard pathétique de lire la prose de nos camarades qui se demandent depuis plus de 40 ans ce qui leur arrive. Et que dire de leur analyse de "l'échec" de Mélenchon : les causes en seraient l'abstention que l'Insoumis n'a pas su attirer, l'échec du vote ouvrier et le fait que l'hégémonie se construit avant les élections en non pendant. 22% des suffrages exprimés c'est donc un échec. Comment, dans ce cas, appeler les 2,2% de Roussel ? Une victoire ? Et comment expliquer cela puisque nos camarades, eux, ont la recette pour convaincre les abstentionnistes, attirer le vote ouvrier et construire leur hégémonie ? Comme à Vénissieux dans le quartier populaire des Minguettes où Mélenchon gagne des voix passant de 45% à 65%, Roussel n’obtenant que 117 voix, moins que Asselineau en 2017. Y'a comme un défaut dans la logique marchaisienne de nos camarades.

 

 

 

Le directeur de la campagne de JLM, Manuel Bompard, a déclaré à propos du processus qui semble se mettre en place pour "le 3e tour": "C'est historique parce que ça enclenche le début d'une dynamique". En effet c'est la bonne analyse.

 

Un programme ce n'est pas les Dix Commandements. C'est un outil politique dont s'empare -ou pas- les masses. Pour réaliser ses objectifs et même aller plus loin. Puisqu'on se réfère souvent, ici comme chez les dirigeants politiques, au Front Populaire, rappelons que les conquêtes de 1936 ont été le fait de la mobilisation et des luttes des classes populaires, classe ouvrière en tête, exigeant et obtenant plus que ce que le programme du Front populaire prévoyait. 

 

Il en sera de même demain si la gauche gagne les législatives. L'affrontement entre deux légitimités institutionnelles pourrait même favoriser les luttes sociales. Et celles-ci peuvent radicaliser la politique de la gauche, la concrétisation et le dépassement de son programme.

 

Il faut d'abord rassembler pour contrecarrer les effets anti-démocratiques du mode de scrutin. Sans ce rassemblement la gauche sortirait gravement affaiblie des législatives. Or les luttes sociales aussi seraient affaiblies dans une telle situation. La rue et les urnes ça va ensemble et ça se renforce réciproquement.

 

La dynamique pour dépasser les limites des compromis exige au préalable des compromis. 

 

Ceux qui ne comprennent pas cela devraient se consacrer à la culture des artichauts plutôt qu'au combat politique.

 

 

 

Antoine Manessis.

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